Les mots de... Christelle Séry du groupe Nadoz
Nous avons posé quelques questions à Christelle Séry, guitariste, à l'occasion du concert de Nadoz le dimanche 2 juin au festival Chinon en Jazz.
Quelle est la genèse de Nadoz ?
Étienne et moi avons des parcours musicaux multiples et complémentaires, entre écritures et oralités, interprétations et improvisations, évoluant dans une diversité de projets artistiques. Après avoir joué ensemble des reprises de musiques traditionnelles acoustiques, nous nous sommes orientés vers la création d'un répertoire original utilisant un dispositif plutôt électrique qui laisse la part belle à l'expérimentation sonore et à nos imaginaires, à des esthétiques ouvertes.
Quel est votre processus de création ?
Les musiques se créent à deux, chacun·e apportant des esquisses (thèmes, idées de formes, harmonies, textes poétiques..) qui sont ensuite éprouvées, malaxées, passées au chaudron avec toutes sortes d’aromates ! Nos dispositifs sont composés de pédales d’effets et pour Etienne d’une structure artisanale amplifiée qu’il a fabriqué spécialement à base d’un deuxième pavillon de clarinette joué à l’archet et avec différentes baguettes. Placé devant lui, cet objet étrange complète son jeu de clarinette basse, offrant des possibilités rythmiques et électroniques.
J’utilise toutes sortes de modes de jeux à la guitare, et des petits objets de préparation mais notre répertoire est aussi très mélodique et nous avons un sens assez poussé du phrasé. Etienne intègre son art de l’ornementation issu de la musique bretonne et de mon côté je cherche à m’en approcher par des subterfuges techniques, des glissés, changements de cordes, bends…
Nous aimons nous questionner sur les fonctions ancestrales de la musique, faisant partie intégrante de la vie des sociétés humaines… Lors de nos séances d’expérimentation, sont souvent revenus des gestes répétitifs liés à notre instrument, ou tout simplement à une forme de transe, de concentration que l’on éprouve quand on joue.
D'où vient cette volonté de choisir l'aiguille comme symbole ?
Étienne a écrit des textes originaux qui évoquent la couture, la forge, les plaines, la paysannerie, la contemplation, et je me fais un plaisir de les porter à la voix en cherchant différentes approches (spoken-word, conte, chant). Dans ces textes, sont souvent décrits les gestes liés à une activité humaine précise, avec tout le vocabulaire spécialisé qui lui correspond.
Dans notre monde ultra numérique, on utilise encore des objets comme l’aiguille ! Objet technique vieux comme le monde, elle a marqué à jamais le chemin de l’humanité. De la couture à la médecine en passant par l’orientation et le temps, elle est utilisée encore tous les jours sur la planète pour les activités humaines. Sa simplicité et sa discrétion en font presque oublier ses dimensions symboliques de lien, de soin, d’histoires.
Alors ce mot, empreint de tant d’intensité nous a plu, et nous l’avons traduit en breton, langue bien présente en Centre Bretagne où est basée la compagnie des Musiques Têtues qui porte notre duo. NADOZ explore donc librement les fonctions ancestrales de la musique qui jalonne la vie des gens, le cycle des saisons. Le son électrique de NADOZ est à la fois énergique et doux, plein de rebondissements.
La musique de NADOZ relie, rapièce et pique parfois.